Sur la route de Consuelo



Je fais beaucoup de promenades à pieds, cherchant quelque plage oubliée vers Consuelo, je pars tôt le matin pour éviter une partie du trajet, la chaleur violente du soleil sur la route. Vers Himensulan, le premier village, et même tout autour de l'île, c'est une petite route goudronnée, peu fréquentée, que je dois suivre. Ce que j'ai déjà constaté, c'est qu'il y à peu d'arbres autres que des cocotiers et j'entends à chaque fois hurler une tronçonneuse au moins une fois sur mon trajet.
A Himensulan, je branche une dame qui discute avec une autre pour savoir quel chemin prendre vers la plage que j'ai repérée. Heureusement, j'ai fait mon repérage sur "Google earth" bien avant de venir ici, il faut savoir que sur cette île l'internet est capricieux, voire même pléthorique. Mon téléphone avec une carte SFR qui fonctionne partout dans le monde, eh bien, ici, ça ne marche pas. Bref, la dame me fait un peu la causette et m'indique la direction, une route de ciment, bordée de maisonnettes. sur le chemin, une vieille dame dans son jardin me hèle en Tagalog ou un autre dialecte auquel je ne comprends rien mais ça fait beaucoup rire les ouvriers qui construisent une maison de l'autre côté de la route. Je souris, me drape dans ma dignité et continue ma route.
Une bande de gosses, à vue de nez entre cinq et dix ans, me salue gentiment et je leur rends leur bonjour. Enfin, je tombe sur une bande de sable blanc qui m'éblouit, une mer plus bleue que le bleu et un chien qui vient aboyer d'un peu trop près. Je suis rompu aux exercices de marche au milieu de nulle part et ne pars jamais sans me tailler un bâton: les chiens sont souvent (mais pas toujours) l'ennemi du marcheur.
Histoire de méditer un peu, je m’assois à l'ombre des inévitables cocotiers: le soleil est déjà brûlant, un peu de fraîcheur m'évitera de griller les neurones qui me restent. Essayez donc ça à l'occasion, ça fait un bien fou: une plage déserte sans le moindre touriste, de l'ombre bienfaisante et une brise qui ne l'est pas moins, c'est le Nirvana...
Au retour, je retombe sur les mini-mômes qui s'essaient à l'escrime avec des bâtons. Je leur propose une passe d'armes: gros succès, des cris des rires, des fuites, je fais le clown, j'adore ça et eux aussi. Quand je les quitte ils me demandent mon nom. Ici, en Asie, je suis "Jon", c'est plus facile à prononcer que "Jean-Pierre", ils me lancent en chœur un "goodbye Jon!" de leurs petites voix de gosses.
Un peu plus loin, la vieille dame est toujours dans son jardin et elle me balance encore des mots que je ne comprends pas, décidément, je suis sa tête de turc. "What's up darling?" que je lui fais, "you want to marry me?". Là les ouvriers du bâtiment en face s'esclaffent carrément, j'enfonce le clou en lui balançant un baiser du bout des doigts: "I love you!". La vieille marmonne quelque chose et je suis loin quand je les entends toujours rire.
J'ai repris la route vers Consuelo et j'ai fait au moins deux essais non concluants vers d'autres plages. L'une d'elles est squattée par un resort en faillite qui à défiguré le paysage, une autre est occultée par le "Mandoglong resort" et il est impossible d'y accéder si l'on n'est pas client. ça me gonfle, j'ai envie de forcer le passage mais des agents de sécurité m'en dissuadent. J'ai vraiment horreur de ces ghettos à touristes, qui non contents de détruire un bel endroit, se l'accaparent. Je discute avec des commerçants locaux: location de motos, restau, etc.. qui se sont installés alentour, visiblement ils ne les aiment pas trop mais ils tirent un peu de revenus du tourisme, alors...
J'ai repris la route depuis un moment, quand j'entends un klaxon de mobylette derrière moi. C'est la dame d'Himensulan, à qui j'ai demandé mon chemin, qui me propose de m'emmener à Consuelo. Je ne bataille pas, je monte derrière elle et bien sûr j'ai droit aux rituelles questions: "vous venez d’où?, vous êtes marié?" et tout et tout..
A Consuelo elle me propose de m'emmener à San Francisco, la "grande ville" de Pacijan mais je ne suis pas un homme facile et je continue ma route seul, elle est sympa malgré tout et me dit à bientôt.
A Consuelo, je tombe sur Danny qui est un peu vexé parce qu’il croit que j'ai loué un autre chauffeur. Après avoir dissipé le malaise: "No Danny, the lady likes me, she carry me for free!". Il me laisse sur le chemin du retour, je lui demande de passer d'ici deux ou trois jours pour une balade de son choix, de préférence vers un bel endroit. Et je reprends la route vers Santiago bay, c'est une belle journée et elle n'est même pas finie...
 


 

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