Retour du soleil!

J'avais oublié le répulsif anti-sangsues, donc à la douche, ça coulait comme dans les films d'horreur ou une nana se fait assassiner en faisant sa toilette, mais bon, péripétie, me suis-je dit. Ce temps à duré encore quelque jours et comme me l'avait annoncé Kai, Stéfano est arrivé, avec lui, il apportait le soleil, un ciel d'un bleu espérance accompagnait son retour. Il y traînait avec lui un gars au cheveux gris, plus renfrogné qu'un maton de prison: Alberto, un pote de Gênes, la ville ou il vit. Pas causant, le gars Alberto, et ennuyeux en plus avec ses habitudes strictement végétariennes qu'il porte comme un flambeau, comme si il portait le salut de la planète en clamant que tous ceux qui ne sont pas semblables à lui sont des imbéciles ignorants. Il fait une cure de riz blanc, soi-disant pour "nettoyer son corps", au bout de quelque jours il se plaint d'être fatigué sans comprendre pourquoi, nous avons beau lui expliquer qu'une alimentation constituée d'un bol de riz par jour ressemble au menu d'une prison Chinoise et que les détenus ne doivent pas être en super forme, il n'en démord pas, la seule chose qu'il dévore ce sont les sermons du gourou Osho, il doit avoir quinze kilos de ses bouquins et moi, qui ne croit déjà pas à la vérité inscrite dans les livres, j'ai du mal à croire qu'un type qui reçoit des Rolls en cadeau et les accepte, puisse délivrer un message de quelque importance...Donc, comme le soleil est revenu, j'ai décidé de partir en forêt, j'ai choisi de remonter un peu la piste balisée vers la cascade officielle de Lu Du et de voir ensuite si je pouvais trouver une voie moins fréquentée. Aussitôt dit, aussitôt fait, à peine deux cent mètres après le début de la piste, je trouve un gros arbre tombé en travers du torrent, de l'autre côté il semble qu'il y ait un canal d'écoulement creusé par l'eau de pluie, bien sûr les quelque touristes qui passent par ici ne suivent que la piste balisée, c'est providentiel, le destin, quoi. Alors je grimpe sur le tronc couché et passe assez facilement de l'autre côté, c'est à dire sans tomber dans la flotte.
Il y à une saignée de trois ou quatre mètres de large et de un mètre à un mètre cinquante de haut pleine de caillasse et de rochers qui serpente à travers la jungle, je n'ai qu'à la suivre. Parfois je dois remonter sur le bord et continuer dans la jungle, c'est un étrange ruisseau qui disparaît et réapparait, au gré de son humeur, coulant sur des roches rougeâtres comme un cristal liquide. Tout en progressant sans trop de peine dans la forêt et sur les cailloux glissants, je repense aux deux jeunes touristes qui remontaient le sentier, ils se sont arrêtés alors que je m'apprêtais à emprunter le pont naturel, on s'est dit bonjour et ils m'ont demandé: "tu vas vers la cascade?" j'ai pointé mon doigt sur l'autre berge, et j'ai dit: "non, je vais par là.." alors ils ont continué leur route, sans une question, ni même un peu de curiosité, ça me fait toujours un peu de peine ce manque d'intérêt véritable pour la nature si vibrante qu'il y à a voir en dehors des sentiers battus, mais bon, ils ont besoin de faire les trucs incontournables et demain, ils seront partis vers des îles plus accueillantes. Au bout de quelque temps, j'ai constaté qu'il n'y avait pas la moindre sangsue, ni beaucoup d'insectes, en tout cas pas le moindre moustique, quelques oiseaux lointains lancent des trilles joyeuses, on entends murmurer le vent dans les cimes des arbres, il règne ici un calme et une paix irréels. J'ai grimpé une colline à la pente vraiment raide, mais au sol plus sec que je n'aurais pu le croire, pour me trouver face à un escarpement rocheux infranchissable, du moins pour moi, qui ne suis pas un grimpeur. Ensuite, après avoir repéré un bon endroit ou établir un campement, une petite surface plane surplombant le lit rocheux en contrebas, plantée de jeunes arbres, j'ai continué à suivre le ruisseau, aussi loin que j'ai pu. J'ai marché, toujours partie dans les caillasses, partie dans la jungle, un joli oiseau au plumage bleu sombre et au bec jaune est venu m'examiner avec une curiosité sympathique. J'ai siffloté pour l'intéresser, plutôt maladroitement, c'est vrai, mais il avait l'air captivé par ma présence, il à tourné autour de moi, à quelque mètres de distance puis finalement à disparu, c'est le deuxième épisode de ce genre qui se produit à une année de distance, est-ce un esprit du lieu? peut-être bien, après tout. Dans un fouillis de rotins épineux, j'ai failli me ramasser la gamelle de ma vie, par chance j'ai pu me rattraper d'une main sur un rocher, évitant ainsi de me transformer en pelote à épingles, je fais une halte, de temps en temps, je hume l'air, j'écoute le silence inhabituel, je respire la forêt, et je me demande si cet endroit est vraiment hanté par les fantômes des prisonniers morts sur cette île, en fait, à cet instant, je crois que oui, mais de toute manière, je n'ai pas peur des fantômes, je crains bien plus la malfaisance des vivants...

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