Maru Masa

Au bout d'une petite route, après avoir traversé un village de maisonnettes de bois peintes de couleurs vives, avec des jardinets de tropique, j'ai découvert la plage de Maru Masa, belle et abandonnée comme une actrice vieillissante sous ses cheveux de palme.
Ancien chantier de bateaux ventrus, polis par les mains calleuses des charpentiers Bugis, elle est aujourd'hui désertée faute de travail, et cela lui donne un air de tristesse nostalgique sous le soleil trop chaud. Des singes se battent dans les épais fourrés, et elle semble se ranimer un peu, se réveille presque, pour un peu on entendrait en écho le choc des outils sur les bordages rugueux. Puis, quelque barques légères aux voiles bleues, arrivent du large avec une lenteur lascive, accostent sans hâte sur le sable humide, des pêcheurs couleur de tabac brun viennent, qui portent des grappes de longs poissons noirs  et argent. Un vieillard crache entre ses dernières dents, un enfant court chercher des mains de son père le fabuleux et chétif trésor de la pêche. Et les gens s'effacent, s'estompent, leur présence paraît n'avoir été qu'une illusion, Maru Masa, la plage aux eaux claires, la plage oubliée, se rendort, rêvant à ses vieux enfants, ses bateaux de bois rouge, aux flancs caressés par une houle de cristal. Les cris des singes ne la dérangent pas, mes pas ne font pas de bruit...

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