Bornéo (3)


Kuching, la rivière Sarawak


Un coup de fil à Moni, le chauffeur qui m'a emmené ici et il me dépose à l'arrêt de bus, je pense à la Rafflésia dans sa citadelle de verdure gardée par les oiseaux bleus et les lézards-coureurs. Sauront-il la protéger contre les brutes?
Le trajet vers Kuching se fait sous la pluie, dans un bus ou les essuie-glaces font encore plus de bruit que le moteur.En fait, j'ai besoin de me reposer un peu, soigner les piqûres d'insectes et les morsures de sangsues sur mes chevilles, j'attends aussi que la pluie se calme.
Entre deux averses, j'ai tout le temps de me balader un peu, je passe dire bonjour à "Wait", le vendeur de colifichets sexuels et de stimulants "pour hommes". Je vais m'enfiler un "nasi goreng kampung" chez "Winnie's restaurant", j'aime bien cet endroit, la patronne (Winnie, donc), est sympa, et les serveuses aux petits soins, ça change de cet étouffant univers d'hommes dans les pays musulmans (réflexion politiquement incorrecte!) C'est vrai qu'ici au Sarawak, province de la partie Malaisienne de Bornéo, la religion est plutôt discrète et c'est très bien comme ça...
Au bureau des parcs nationaux, ils se tiennent au courant de la météo qui nous à prédit deux jours sans pluie à partir de demain. Je rencarde la navette pour demain matin, Semenggoh n'est qu'à quelque km.
 
Ce parc est particulier, il est réservé aux Orang outan en difficulté, blessés, orphelins, hélas les raisons ne manquent pas. Les gardes nous font patienter en attendant que d'autres personnes arrivent, aargh! un groupe! tout ce que j’abhorre, mais bon, les fonds collectés avec les droits d'entrée, servent à l'entretien des structures et aux soins des Orangs.Une petite demi-heure de marche, dans les bois, nous stoppons, non loin d'une plate-forme de bois sur pilotis, le guide nous à fait un speech concis: n'approchez pas les grands singes, sous leurs dehors placides ils peuvent s’avérer très dangereux pour les imbéciles qui tenteraient de faire ami-ami.
Les gardes ont disposé des fruits en quantité mais les singes(ça m'ennuie vraiment de les appeler comme ça) se font désirer assez longtemps. Il n'y à qu'une quinzaine de personnes mais c'est déjà trop, quand un gros mâle roux fait finalement son apparition, les flash crépitent. On croirait l'arrivée de Brad Pitt au palais des festivals à Cannes...
C'est qui, les singes?

Ça c'est les gamins, toujours à faire les malins..
Une femelle et son petit arrivent ensuite et un jeune tout fou-fou qui fait son cinéma (comme à Cannes forcément) Tandis que les gens mitraillent je questionne Jamal, le chauffeur du minivan qui m'a emmené ici. J'ai remarqué des débuts de sentiers balisés qui s'enfoncent dans la forêt, mais qui ne semblent plus pratiqués depuis longtemps. Jamal me dit qu'un minimum de fonds sont attribués aux parcs nationaux par le gouvernement, qui par contre, délivre "généreusement" des autorisations d'exploitation forestière. Pourquoi y-à t'il toujours des trucs qui me mettent en colère? c'est moi ou c'est les gens?.

 Les Orang outan sont repartis dans les arbres, je préfère les voir ainsi plutôt que sous les flashes, ils se baladent au-dessus de ma tête et je m'attarde à les regarder, quand j'arrive dans la clairière, je vois la femelle et son petit qui observent les touristes agglutinés au-dessous, leurs appareils-photo à bout de bras. C'est un étrange spectacle ou ce qu'on appelle un "singe" semble plus civilisé que les "humains".Ce qui m'a vraiment fait un choc, c'est le regard des "grands rouquins" l'acuité de leur prunelle sombre, d'une humanité, d'une si étonnante intelligence, de sagesse, oserais-je dire.
 
 Ce sont des lieux communs que l'on débite dans les repas mondains pour paraître sensible aux yeux des autres, mais c'est une réalité pour moi. Comment peut-on les blesser ou les tuer, les réduire en captivité sans états d'âme? Mais je suis stupide de poser des questions si puériles, il est vrai que l'homme n'a aucune respect pour ses semblables, pourquoi en aurait-il pour ce qu'il considère être des "animaux"?A Kuching j'ai porté un Coca frais à Wait, je me suis enquis de la stabilité de son commerce Il m'a rassuré, même si il lui est interdit d'ouvrir une vraie boutique, ses affaires vont bien: tant que les hommes s’inquièteront du bout de viande entre leurs jambes, il ne craint pas le chômage! Les Orang outan ne peuvent rivaliser avec ça...
Ensuite Supermachin est venu au secours d'un chaton qui avait failli se noyer en cherchant à attraper les carpes dans le grand bassin, au bord de la rivière. Il était resté perché sur un spot électrique, juste au milieu. J'ai du faire appel à un employé communal, opportunément muni d'une grande épuisette destinée à nettoyer ces même bassins. Le soir, c'était la fête anniversaire de la fondation du premier temple Taoïste de la ville. Les Chinois ne connaissent pas la simplicité et le dépouillement, ce ne sont que pétards et dragons dansants, défilés de jeunes gens en tenue traditionnelle, couleurs et dorures, un dernier soir en fanfares. Demain je m'en vais et j'ai le bourdon, bien sûr. Je suis toujours face au même paradoxe: j'aime partir mais je suis triste de m'en aller, mais ce que j'emporte est précieux et ne tient jamais de place dans mon bagage...



J'ai aimé les gens du coin, les arbres, les bestioles, je suis le "ravi" le simplet, de la crèche provençale, j'ai seulement mes colères en plus, cette génération hérite d'un monde abîmé, qu'en sera t'il de la prochaine?
Si vous passez par là, Bako est un endroit magnifique, on peut y voir des tas de bestioles, des plantes carnivores, des singes nasiques, mais 2 ou 3 jours ça n'est pas assez, surtout pour les gens qui aiment réellement la nature. Les nombreux sentiers, pas trop entretenus, il est vrai, vous immergent dans un monde trop grand pour jamais l'oublier...



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