Au large des rêves..




“Les grandes personnes ne comprennent jamais rien toutes seules, et c’est fatigant, pour les enfants, de toujours et toujours leur donner des explications.”

Antoine de Saint-Exupery/ "Le petit prince"


Je suis arrivé sur l'île sous un ciel un peu gris après les rues mouillées de pluie de Hat Yai et les vagues gonflées par le vent qui semblaient dures comme du bois sous la coque de plastique du "speedboat".
Au détour du promontoire rocheux, les grosses collines de grès couvertes de jungle m'ont paru douces par comparaison.
A peine débarqué, je croise des rangers qui me reconnaissent et me saluent, rien n'a changé ici (pas encore) je traine encore ce sac trop lourd vers la reception et l'arrêt du "Ao Pante- Molae express bus" comme je l'appelle. Le chauffeur me salue et me fait monter a l'avant, par la vitre ouverte, je hume les parfums de la jungle. Le vieux camion couine et gémit sur la tortueuse route de béton qui serpente au milieu de la végétation, la verdure nous entoure, nous étreint: je suis enfin arrivé!
Comme je l'avais prévu, après les retrouvailles avec Kaï et ses collègues, monter la tente me prends 10 minutes et installer la protection contre les singes, plus de deux heures... Ils sont là les Macaques, les malfaisants primates (on peut en dire autant des humains!) mais si je veux rester plusieurs semaines je ne peux que camper, solution la moins onéreuse et la moins facile.
Mon premier soir, je goûte la quiétude du jour finissant, face à la mer, sous les Terminalia catappa aux larges feuilles ou j'ai monté mon abri, mon domicile pour presque deux mois, le foyer de mes rêves nocturnes et diurnes aussi...
Le lendemain matin, après une nuit chaotique, peuplée de songes étranges, toilette, soupe de riz aux fruits de mer et café, je m'équipe: pantalon de treillis, chaussures, gourde, machette, appareil photo et un en-cas vitaminé: (j'ai emporté aussi, depuis la France, dans mon sac si lourd, 5 kilos de rations de survie, de la nourriture et des calories dans un volume minimum).
La forêt me semble si belle et si parfumée, au bout de quelque kilomètres, je quitte le chemin de terre et je m'enfonce dans son sein bruissant et frémissant. Insectes, singes et oiseaux s'expriment chacun dans son langage pour signaler l'arrivée d'un intrus mais il suffit que je m'assoie en silence, sur un rocher au bord de l'eau, pour qu'ils m'oublient et que, progressivement le coeur de la jungle retrouve son rythme normal. J'ai alors la sensation enivrante de m'être "effacé" du monde.
Ici, L'univers du vivant à ses quartiers, je peux croire que je me fais oublier des animaux et des reptiles, mais les insectes ne m'en laissent pas l'illusion. Chaleur corporelle et transpiration attirent moustiques et mouches, tiques minuscules, une armée silencieuse s'est dressée dans le but de faire un repas sur mon compte, le répulsif, dilué par la sueur ruisselante ne fait plus son office, d'ou le chapeau de brousse, le T-

                                              



shirt à manches longues et le foulard autour du cou pour éviter que des bestioles ne prennent ma nuque et mon dos pour un buffet à volonté. Pourtant, je suis heureux d'être là et cette plénitude vaut largement la somme dérisoire qu'elle m'a coûté, en fait elle n'a pas de prix, elle ne peut être quantifiée en monnaie, cette valeur qui ne concerne que les choses achetées, les objets de consommation...




Commentaires

Articles les plus consultés