Mediter sur la dune



C’est un dimanche d'été, je viens de prendre un an de plus dans la tronche et du coup, j'ai envie de m'aérer. Je suis du matin, et ce matin semble parfait pour une balade en vélo. Le bleu pâle du ciel s'ouvre lentement comme une porte sur le lever du soleil, la douceur de l'air me réconcilie avec les aléas de la vie en région "tempérée". Il est huit heures, le moment d'enfourcher mon vieux VTT pour pousser une balade le long de la dune.
Vite traversé le village d"été et le tas de camping-cars alignés de manière réglementaire sur leur parking réservé. Ils sont encore endormis, ces braves vacanciers et je profite de leur absence. après l"asphalte, le chemin de terre, puis la forêt de pins au sol matelassé d'aiguilles brunes, encombré de branches mortes et de fruits écailleux, de "pignes" comme on dit ici.
Enfin, je quitte le chemin, les pneus crantés mordent dans le sol sableux, les herbes dures, les lichens desséchés, parfois, le sable trop mou, happe mes roues, je dois mettre pieds à terre, hors d'haleine, je sors ma gourde, une gorgée d'eau descends dans ma gorge altérée.
Je grimpe sur la dune, tirant mon vélo avec moi, il fait déjà chaud. De la-haut, quand je m'avance un peu, je vois la mer, bleu sombre, lisse en apparence, presque immobile et j'inspire son parfum puissant, je ressens sa présence patiente, j'entends le grondement inlassable des vagues, brassant et polissant le sable du rivage. J'ai seulement besoin de me retourner pour voir le moutonnement vert de la forêt, entendre le chant des cigales, voir à contre-jour, le vol d'une Buse variable, à la recherche d'une proie.
Je choisis un endroit, face à la forêt et je m'assieds pour un instant de méditation, en face, le soleil qui s'élève lentement, sa chaleur caresse mon visage. Mes paupières fermées sont un voile doré et je m'enferme à l’intérieur de moi-même, dans ma maison de bambou, un abri qui respire et qui ressent, que je construit juste en pensée. Mes sens palpent l'univers autour de moi, ah! le plaisir de ne penser à rien, de n'être ni futile ni sérieux, seulement une minuscule poussière d'homme, grain de sable sur le sable de la dune.
Une demi-heure est déjà passée, le temps ne comptait plus et le revoilà, je reprends mon vélo, dégringole la pente. Là-bas, la forêt commence, mais c'est une avant-garde, des soldats sacrifiés qui supportent la force du vent des tempêtes en hiver, la gifle salée des embruns mêlés de sable. Les premiers arbres ne sont même pas des arbres, juste des buissons, rampant au ras du sol, et plus loin derrière ils grandissent à peine, blessés, tordus, brisés, cherchent désespérément à reprendre leur place à se redresser, contusionnés sans fin dans des cabrioles douloureuses. Devant moi, un lièvre s'est enfui, me montrant son cul blanc qui court en zig-zag vers les fourrés de ronces et la buse à infléchi son vol juste une seconde trop tard.
J'ai traversé ensuite une zone de pins grêles mais droits, emmêlés dans une jungle de ronces et d'ajoncs, ceux-là non plus, on ne les coupe pas, ils protègent les vraies cultures, les pins alignés comme des plants de maïs, monotones et sans surprises, traversés par une piste cyclable que je n'emprunte pas, une autoroute de cyclistes de marcheurs et de joggers bruyants et polis. Je me contente du chemin forestier, après tout, le VTT c'est fait pour ça, rouler n'importe ou, sortir des sentiers battus, écouter respirer la nature, s'imbriquer un instant dans la place qui nous est réservée au sein du monde. et je me dis que quatre mois me séparent encore d'une autre nature, d'une autre forêt, issue d'un monde si différent mais qui pourtant est le même...
D'un côté la forêt..


La première ligne.
De l"autre, la mer..

Dans un creux de dune, une mare à grenouilles.

La lutte contre le vent et le sel.

Les premiers arbres, un peu maigrichons

La jungle des pinèdes



Au bord du sentier, la fougère Aigle



Alignés comme de vraies plantations..

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