Souvenirs du Népal (2)




Ce voyage au Népal, n'était pas vraiment une démarche de touriste. Plusieurs années avaient passé et je voulais revoir mon ami Sanjay. Sanjay, dit: "Sunny" est d'origine Indienne né à Jaipur, dans le Rajasthan ou je l'ai rencontré, bien des années auparavant, lors de mon premier voyage en Inde. A présent, Sanju était marié, pére d'un gamin de treize ans, dire que j'avais connu Sanjay bien avant qu'il n'envisage la paternité. Fidèle à la tradition du commerce des bijoux et des pierres dans la ville rose, Sunny avait émigré au Népal et ouvert sa petite boutique à Kathmandu, dans le quartier touristique de Thamel. C'est la troisième fois que je reviens dans cette ville attachante et chaotique avec pour but principal de lui rendre visite. Le problème, c'est que j'ignore ou il se trouve, la boutique précédente, ou il n'était qu'employé; n'existe plus et j'ai dû traîner plusieurs jours à KTM avant de tomber sur lui. Sanjay, mon ami, on s'est connus si jeunes, tu avais pris un peu d'embonpoint, forcément, les chapatis bien beurrés de ghee, de beurre clarifié, avaient fait leur oeuvre. C'étaient de vraies retrouvailles, par hasard, en déambulant par les rues, on s'est reconnus tout de suite, il m'a présenté aux Cashmiris des échoppes voisines, on à bu le thé brûlant, servi par un petit "tchai-wallah" qui parcourt la ruelle en transportant son panier en fil de fer. Et on à évoqué le bon vieux temps, les courses en scooter dans les ruelles de Jaipur... J'aimais beaucoup la mère de Sunny, elle m'accueillait avec tellement de gentillesse, comme un de ses fils, et j'ai réalisé que ma propre mère ne m'avait pas entouré de tant d'attentions. Malgré son âge et le vieillissement rapide des femmes pauvres, en Inde, elle était d'une saisissante beauté, éclairée par un regard gris nuage, comme on n'en trouve que chez les femmes Rajput. On dormait à trois dans le même lit, avec Vishnu, son frangin, dans leur petite maison d'un quartier populaire de Jaipur, un lotissement, en fait, mais ce mot n’a pas tout à fait le même sens que chez nous. J'avais donné ma médaille de baptême et sa chaîne en or, pour aider à constituer la dot de la petite sœur, je suppose qu'à présent elle doit même avoir des enfants. Dans la bande, il y avait Monna, j'aimais bien ce type, son regard, surtout, un regard profond comme la nuit, de la droiture et un peu de folie. Il y avait aussi shankar, un allumé qui se prenait pour le maître du monde parce qu'il faisait des affaires au Johari bazaar, le quartier des lapidaires et des bijoutiers et qu'il aimait payer des verres et de la nourriture... Je suis venu huit fois en Inde et à Jaipur, parmi les meilleures années de ma vie, j'aimais cette ville, traîner dans le quartier des sculpteurs, dans le bruit des burins sur la pierre, devant les tas de débris de marbre qui s'accumulaient au long des ateliers, le marché des tisserands, les cerf-volants au-dessus des terrasses, les singes voleurs, capables de voler un sac de beignets en un clin d’œil, sous les yeux du marchand désolé et résigné. Au gré de mes pérégrinations, il y avait toujours quelqu'un qui me reconnaissait sans que je le connaisses: Ah! tu es un ami de Sunny! viens chez moi, ça ne t'embête pas, non? Bien sûr que non, je prenais des thés au gingembre, brûlants et sucrés, grignotais des pâtisseries au miel, des dames en sari s'empressaient autour de l'hôte étranger, sûr que ça me changeait de chez moi, ou le type qui vient d'ailleurs n'est qu'une merde de chien sur le trottoir.
Alors on à évoqué tout ça avec Sunny, assis dans l'étroite échoppe encombrée par les vitrines, ensuite nous sommes allés au marché, acheter de quoi faire un curry de mouton, sur une sorte d'établi en bois, plein de morceaux de viande et orné d'une tête de mouton, un gars pas trop net sur lui, nous à débité de la bidoche à grands coups de tranchoir, il à fourré le tout dans un sac en plastique et on est monté chez Sunny. Minna, son épouse, est une perle de nana, une Indienne, avec tout ce que ça comporte de tradition d'hospitalité et de qualités de cuisinière, j'avais une faim de tous les diables et l'odeur du curry et des chapattis qui cuisaient me faisaient défaillir. Le fiston de Sunny à un nom en Hindi que je ne connais pas car il l'appelle Viktor, comme dans toute cette région du monde, il est gentil et respectueux avec ses aînés, un peu rondouillard et passionné par la technologie. Nous avons mangé, moi et Sanjay, Minna est restée à l'écart, c'est la tradition, mais elle était heureuse de m'entendre dire que son curry était délicieux, et croyez-moi, c'est vrai, la pire chose que l'on puisse faire serait de manger avec des couverts, le contact des doigts avec la nourriture étant un ingrédient essentiel. D'ailleurs c'est Sanjay qui m'à enseigné comment prendre un morceau de chapatti de la main droite et ensuite s'en servir comme d'une cuillière. En Asie, la main droite est celle qui sert aux tâches nobles comme manger, la gauche, c'est pour se nettoyer les fesses avec de l'eau, aux toilettes!
Le soir, je suis rentré à mon hôtel, tout nostalgique, repensant à notre conversation, Shankar est mort, un accident, mais cela ne m'étonne pas, c'était un chien fou, Monna est dans un fauteuil roulant, après un autre accident, lui si vivant, si droit. Je voudrais bien le revoir un jour, tant d'années plus tard, et tandis que je penses à tout cela, et que j'écris ces mots, je me demandes si je ne vais pas revenir à Kathmandu. C'est le problème, je rencontre des gens, je promets de revenir les voir et je tiens mes promesses, du coup il y à plein d'endroits ou je ne vais pas, mais cela me fait plaisir de constater la surprise dans les regards, car à vrai dire, les voyageurs promettent toujours de revenir mais ne le font jamais, mais, si l'on tient vraiment sa promesse, c'est là que l'aventure commence...

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