Anniv'

Ouais,  aujourd'hui c'est mon anniversaire, pas de quoi fouetter un chat, d'ailleurs je fouette rarement les chats, selon moi ce n'est pas une occupation très passionnante et en plus, j'aime bien les chats... Bref, ce jour est un jour comme les autres ou presque, ici, c'est la saison touristique et il y à beaucoup trop de monde pour mon goût. J'ai des nouveaux voisins, heureux locataires pour quinze jours de vacances, de la petite maison mitoyenne, collée épaule contre épaule au minuscule gourbi ou je vis. Ils se lèvent tard, moi, je suis plutôt du matin, un bon point pour eux. Mais dès que le gamin pré-ado et son paternel sont debout, ils jouent à la pétanque sous mes fenêtres. Moi qui suis habitué au silence une bonne partie de l'année, voilà que mes instincts de vieux grognon se réveillent. Au début, je croyais que des ouvriers empilaient des parpaings ou cassaient du béton à coups de pioche, mais non, ce n'était que le bruit des boules d'acier frappant le sol et s'entrechoquant, accompagné des hurlements du gamin dont la voix est en pleine mutation, des grognements incompréhensibles du paternel et des cris suraigus de la petite sœur: "C'est à moi! c'est à moi!". Et puis je me suis dit que peut-être, ce devait être de ces rares moments ou de nos jours, un père peut passer un peu de temps avec ses enfants, d’où le bruit, l'excitation des gosses... En fait, pas de quoi fouetter un môme, et puis, j'aime bien les enfants, leur enthousiasme à gober la vie sans se douter de quoi elle sera faite...
La mère, elle, est plutôt calme, elle fait ce qu'elle doit faire toute l'année: balayer, étendre du linge, préparer la bouffe, faire la vaisselle avec de temps en temps, l'accalmie d'une après-midi sur le sable surpeuplé de la plage et un repas dans un de ces restaus pas vraiment gastronomiques qui fleurissent ici pendant l'été. Il y à aussi une mamie (Elle est pleine comme un œuf, cette bicoque!) mais ce pourrait être la momie de Toutankhamon, on ne l'entends jamais, elle reste collée devant la télé à regarder des programmes ineptes, le son réglé un poil trop haut, la pauvre, elle doit être un peu sourde...
Et ça me ramène à mon anniversaire, voilà ce que je deviens, un vieux meuble vermoulu qui craque. Quand les anniversaires commencent à vous foutre le bourdon, ce n'est pas bon signe, alors je pense à autre chose. depuis un mois déjà, je me suis mis dans l'idée de faire des randonnées de plusieurs jours dans la jungle, sur mon île, là-bas, en Thaïlande, loin du bruit et de la fureur. J'ai acheté le moins cher possible (Je ne suis pas tout à fait du genre bobo friqué) tout ce dont j'aurais besoin, notamment un hamac avec moustiquaire et une bâche légère de 3m sur 2 pour dormir en forêt. Ce sera une grande première: la jungle plongée dans le noir avec les bruits nocturnes, les trucs qui rampent et qui grattent le sol, les cris bizarres de bestioles sans forme. Je pense que j'aurais du mal à m'endormir, là-bas, tout seul, sans des murs pour me protéger, même si j'en ai déjà eu un avant-goût, vu que je plante toujours ma tente à l'extrême lisière du bois. Les premières nuits avaient été chaotiques, pleines de craquements, de bruits de pas dans les feuilles et de cris qui faisaient penser à un enfant qui pleure, juste au-dessus de ma tente, dans le gros arbre, si sympa le jour et mystérieux la nuit. J'imaginais un étrange oiseau noir aux immenses yeux phosphorescents et, faute de pouvoir fermer l'oeil, je descendais sur la plage, éclairée par des milliards d'étoiles, comme de la poussière scintillante figée dans l'espace. Les étoiles étaient aussi dans la mer et ses vaguelettes mourantes, une crème sombre, mouvante, peuplée de minuscules existences phosphorescentes, la marée se retirait et laissait un miroir lisse ou se reflétait le ciel, ma poitrine se gonflait d'émotion, comme toujours devant trop de beauté. De la pure magie, je vous dis...
Donc, voilà, faut vous dire qu'en ce moment j'ai du temps de libre, c'est pas trop la joie côté boulot, notre gros client, le groupe papetier Gascogne, est secoué de frissons et brûlant de fièvre: une dette de 120 millions d'euros et deux requins qui se battent pour le contrôle en se foutant pas mal des remous. Les carnivores en question ont des noms: Guy Wyser-Pratte, un "raider" Américain qui s’intéresse aux entreprises qu'il juge sous-évaluées et François Gontier, son ancien partenaire devenu ennemi juré après quelques lâchages et indélicatesses de part et d'autre. Autour de ces braves gens, se nouent alliances et trahisons, le jeu sinistre qui consacre la faillite du système, laissé entre les mains de ces animaux sans âme, obnubilés par le profit et qui considèrent pouvoir récolter plus de fruits en coupant les branches de l'arbre. Tout compte fait, je préfère la jungle, la vraie, elle fait peur elle aussi mais elle est tellement plus belle. Il me tarde de repartir, je resterai sans doute plus longtemps, plutôt que de me morfondre ici, chercher du boulot ce n'est plus ma tasse de thé, c'est vrai, j'oubliais, j'ai cinquante-huit ans aujourd'hui...
Un petit merci à M'ame Fontaine pour son message, je suppose que ce n'est pas un hasard si il à été posté ce jour particulièrement. La vache, je suis bavard aujourd'hui mais ça fait du bien de se lâcher. Hier j'ai perdu mon chéquier, j'espère que l'opposition fonctionnera avant que je me retrouve à financer des vacances tristes et des soirées en boîte de nuit sinistre, ça serait un comble et c'est vraiment une journée bizarre, avec un ciel bas et des bruits étouffés, somnolente, sans voix, je crois que je n'irai pas sur le bout de plage presque déserte ou je vais me relaxer de temps en temps..Forcément, j'ai du temps de libre...

Commentaires

  1. pas un hasard dutou. Visité ton jipédel.

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  2. me fait rire quand ton robot me demande de prouver que je ne suis pas un robot en retapant les lettres qu'il affiche si mal!

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  3. Mince alors, chavais même pas que j'étais gardé par un robot!

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Allez, sois pas timide!

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